Non vraiment j'en ai marre. Je veux bien que Noël approche, que tout le monde soit prêt à pardonner, à être gentil, voire à manger des huitres, mais il y a des limites qu'il faudrait éviter de dépasser.
Alors voilà, nos murs publicitaires sont recouverts de nouveaux mensonges, de moults clichés stupides et messages à peine respectueux des êtres humains que nous sommes. Il y a le téléphone géant, qui fait la taille d'un sapin de noël, et qui tient dans la poche. Passe encore. Il y a les grands magasins qui nous resortent leurs publicités moches version Jean-Paul Dégoût pour les uns, papa bricole pour les autres. Et déjà, là, je déprime un peu. Mais quand arrivent les grandes surfaces, on atteind le comble, l'apogée de la connerie humaine débilisante.
Chaque fois qu'on entend les féministes dénoncer un complot sexiste, on rigole grassement en arguant que les temps ont changé, sans que la meute ne semble s'en appercevoir. Sauf qu'en réalité, nous sommes tous complètement aveugles ou embrigadés pour nier une telle évidence. Tous les jours - et c'est pire en ce moment - Intermarché nous colle sous les yeux des clichés même pas déguisés de la femme au foyer, bonne mère, à qui il faut penser quelques jours par an : Donnons plus à celles qui donnent tant. Les autres, celles qui ne se dévouent pas corps et âme à leurs enfants et époux, voire, qui n'en ont pas, méritent à peine qu'on parle d'elles. Pendant que les mousquetaires tentent de faire reculer la cause féminine de quelques siècles, Kiabi nous tanne avec celles qui en veulent plus. Et moi je n'en veux plus.
Mais les supermarchés n'ont pas l'exclusivité de la bêtise qu'ils représentent si bien. Regardez bien les affiches ; ce sont les femmes qui font les courses de Noël, jamais les hommes. Ou alors, pour offrir à ces mêmes femmes un pendentif en or trente-carats-massivement-garanti-à-vie-qui-brille, parce que c'est un cadeau viril, et qu'il faut des couilles pour entrer dans une bijouterie quand on est un mâle, un vrai. Éventuellement, pour mettre tout le monde d'accord, on peut aussi offrir à ces dames un téléphone portable, histoire de pouvoir les appeler le soir avant de rentrer du travail, pour savoir ce qu'il y aura à manger, ou pour prévenir bobonne qu'on arrivera en retard parce qu'une réunion imprévue déborde du cinq à sept, et tend vers le sept-à-onze (fois par quinzaine). Les hommes que nous sommes n'ont besoin que de cadeaux superficiels, des organizers électroniques, des gadgets compliqués qu'aucune espèce de femme ne saurait manipuler, de toute façon.
Les femmes en revanche, qu'elles soient jeunes ou vieilles, sont toujours exagérément lisses, belles, blondes et fatales. Elles couvrent les murs avec des cadeaux plein les bras et le regard bienveillant. Les jeunes vont chez Célio et ressortent en groupe avec de quoi habiller tous les SDF de France pour quinze ans. Les moins jeunes, le sourire Colgate scotché au visage et les rides bienveillantes, offrent des machins chers qui vont avec leur fortune personnelle suggérée. Quand ces braves dames n'ont pas des cadeaux plein les bras, elles veillent sur des moufflets souriants et polis. On les imagine déjà en train de nous servir des s'il-vous-plait-merci-vousêtestropaimable et des réflexions d'adulte. Maman j'ai raté l'avion mais je prendrai le prochain, cesse de te ronger les sangs et de pleurer dans les bras de papa. Et souhaite un joyeux noël à grand-père et grand-mère.
Histoire de responsabiliser un peu plus ces têtes d'ange, on leur créé un monde à l'image des grands (couillons). Des voitures, des tractopelles et des buses pour les garçons, de fausses planches à repasser, des landeaux et des biberons pour les filles. Pour les intellos hors du lot, on ajoute deux pages « jeux de société », dans lesquels on trouvera en majorité des jeux d'échecs électroniques et des plateaux de Solitaire, suffisamment laids pour les faire flipper et les décrédibiliser aux yeux de leurs éventuels amis. Ils finiront bien par rentrer dans le rang, au forceps s'il le faut. Pour les vendeurs de jouets, la symbolique est essentielle. Du rose pour les filles, et du bleu pour les garçons. Des princesses et des zorros. Des barbies et des Action Man, des robes ou des pantalons.
Nous sommes à une époque de l'année où on éduque toutes les générations pour en faire de parfaites pouffiasses et de gros connards. Noël, c'est débilisant.